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Revue de l’Institut du Monde et du Développement | 77

« [26] L'article 11 de la Charte ne limite pas son champ d'application uni-
quement à l'hypothèse dans laquelle la violation des compétences d'une col-
lectivité locale ou de son autonomie provient de la part de l'État ou d'une
autorité régionale, donc de la part d'une administration supérieure. Le texte
ne fait aucune distinction, et il en résulte ainsi qu'une collectivité locale a le
droit à un recours juridictionnel contre tout sujet de droit qui méconnaît ses
compétences ou son autonomie, y compris contre une autre collectivité lo-
cale ou contre un particulier.
Il est vrai que, dans un litige entre deux collectivités locales (ou entre une
collectivité locale et un particulier), l'administration de l'État est en principe
neutre. Cependant, on ne peut considérer conforme à l'article 11 de la
Charte, comme le Gouvernement norvégien le soutient, la situation dans
laquelle un recours d'une collectivité locale, introduit devant une administra-
tion de l'État contre une autre collectivité locale, soit assimilable à un re-
cours juridictionnel.
Le simple fait que l'administration de l'État puisse être neutre (impartiale)
dans un litige opposant deux collectivités locales ne la transforme pas en
tribunal ou autre organe juridictionnel (la garantie d'indépendance n'étant
bien évidemment pas remplie). En outre, le droit à un recours juridictionnel
suppose que la procédure soit équitable et offre des garanties comme le con-
tradictoire, la publicité des débats, l'égalité des armes, les droits de la dé-
fense, la motivation de la solution. Or, le Gouvernement norvégien n'a pré-
senté aucun argument en ce sens, se bornant à affirmer le droit de la collec-
tivité locale de faire des commentaires avant que l'administration de l'État
ne se prononce sur le recours administratif.
Il en résulte que, comme il vient d’être dit, le recours devant l'administration
de l'État, en cas de litige entre deux collectivités locales (ou entre une collec-
tivité locale et un particulier), ne peut pas passer pour un recours juridic-
tionnel au sens de l'article 11 de la Charte. Par suite, la décision rendue par
l'administration de l'État doit être susceptible d'un recours juridictionnel,
conformément à l'article 11 de la Charte. […] »
Par ces motifs, le groupe d’experts « est d’avis que la législation norvé-
gienne, telle qu’interprétée par les tribunaux, ne peut pas être considérée
comme étant pleinement en conformité avec l'article 11 de la Charte euro-
péenne de l’autonomie locale dans la mesure où elle ne permet pas aux col-
lectivités locales de disposer d'un droit de recours juridictionnel – afin
d’assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes
d'autonomie locale qui sont consacrés par le droit national – à l’encontre des
décisions prises par l'administration de l'État, en particulier, lorsque de telles
décisions sont prises suite à un recours administratif formé à l’encontre d’une



RIMD – n o 3 – 2012
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