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Revue de l’Institut du Monde et du Développement | 75

vège, c’est généralement l’État qui détermine la légalité de la décision liti-
gieuse ou se prononce pour savoir si la décision relève d’une compétence
nationale ou locale. Il n’est pas exagéré de dire que, dans le système actuel,
le représentant de l’État dispose du monopole du contrôle exercé sur les col-
lectivités locales et est parfois une instance d’appel en cas de litige entre un
particulier et une collectivité locale. En effet, le fylkesmann ou « gouverneur
de comté » (équivalent norvégien du préfet), nommé et responsable devant le
gouvernement central, cumule diverses fonctions, dont le contrôle sur les
collectivités locales. Il exerce la tutelle sur les actes des collectivités locales,
mais il statue sur les plaintes portées contre les décisions prises par ces der-
nières.
En droit norvégien, un particulier qui estime qu’une décision d’une collecti-
vité locale lui a fait grief peut introduire un recours gracieux auprès de cette
collectivité locale afin qu’elle réexamine l’affaire, puis introduire un recours
« hiérarchique » devant le représentant de l’État contre la décision de la col-
lectivité locale. La spécificité de cette procédure est la suivante : dès qu’une
décision d’une collectivité locale a fait l’objet d’un recours « hiérarchique »
devant le représentant de l’État, l’Administration norvégienne considère que
le litige en question ne relève plus de la compétence propre de la collectivité
locale (ce qui revient presque à nier l’existence de compétences propres ou
exclusives des collectivités locales et même de l’autonomie locale…). De
plus, en droit norvégien, lorsque l’État statue comme instance d’appel pour
des décisions des collectivités locales adoptées dans certaines matières, la
décision prise par l’État est définitive et obligatoire pour la collectivité locale
5
et cette dernière n’a pas le droit de saisir la justice .
Dans l’affaire Kongsberg-Nes de 2007 (affaire 2007-234), la Cour suprême a
confirmé que les décisions du fylkesmann ne pouvaient faire l’objet d’un
recours auprès des tribunaux et a montré, par sa décision, qu’en pratique, la
Charte européenne sur l’autonomie locale avait, somme toute, peu
d’importance du fait du système dualiste norvégien.

5 C’est ce qu’a affirmé le Comité de sélection des recours de la Cour suprême de Norvège
dans l’affaire 1993-445 : « Le Comité de sélection des recours et la Cour d’appel
s’accordent à reconnaître que le statut de la collectivité locale, qui est une autorité pu-
blique aux termes de la Loi relative aux concessions, ne peut pas en soi justifier l'octroi à
la collectivité locale du droit d'agir en justice. La collectivité locale n’a d'ailleurs pas
argumenté en ce sens ».
Traduction tirée de l’avis motivé du groupe d’experts indépendants de la Charte euro-
péenne de l’autonomie locale sur la conformité de la législation norvégienne avec l'ar-
ticle 11 de la Charte européenne de l'autonomie locale. N.B. : Dans cet avis, trois autres
décisions de la Cour suprême sont également examinées :
https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CG137PART2&Language=lanFrench&Ver=origin
al&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorL
ogged=FDC864 (consulté le 21.02.12).

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