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Revue de l’Institut du Monde et du Développement | 49

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dans le régime de protectorat qu’a connu le pays dans l’entre-temps. Sur le
plan fiscal, dès son indépendance, le Maroc semble – au niveau central –
entretenir un brûlot, car « l’État procède par retouches périodiques appelées à
chaque fois généreusement “réforme fiscale”. Ces interventions contingentes
et sporadiques prennent, pour des raisons bien connues, souvent les lois de
finances comme support de leur promulgation. La production de ces ré-
formes financières ne s’est jamais réalisée sous l’effet des impératifs de dé-
veloppement, mais a été plutôt provoquée par des circonstances de crise. De
telles réformes ne sauraient être nécessairement que de circonstances, appe-
lées à être précipitées, inconséquentes, précaires, fragmentaires d’où foison-
nent des textes et des réformes, remaniements incessants des impôts : créa-
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tion de nouveaux, suppression d’autres… » . L’un des mérites de ce pays est
qu’il n’a pas attendu l’ère des conditionnalités comme tant d’autres pays – le
Cameroun en premier – pour entreprendre de profondes réformes de son
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organisation financière locale , qui n’ont pourtant pas eu pour effet de
rompre avec la tradition centralisatrice du pouvoir, ou d’associer effective-
ment les contribuables à la gestion des affaires locales, encore moins de
mettre fin au statut particulier des communautés urbaines de Casablanca et
Rabat dont la gestion est assurée par des gouverneurs ou des walis (autorités
déconcentrées). À la tutelle générale exercée sur les communes (contrôle a
priori, contrôle a posteriori, contrôle en cours d’exécution sur la légalité et
l’opportunité) et qui porte sur les personnes et les actes, s’ajoute une tutelle
financière (sur la régularité et l’opportunité). La tendance centralisatrice de
l’État se manifeste même au travers des actes types que les communes se
voient imposer dans le cadre de l’exercice de leurs compétences.
Le système fiscal commence à se défaire de sa multitude d’impôts et taxes
cédulaires à la faveur de la loi-cadre de 1984, laquelle « a permis d’asseoir le
système fiscal de l’État, à l’image des systèmes fiscaux modernes, sur quatre
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principaux impôts et taxes et d’introduire pour la première fois un certain

http://espacepolitique.revues.org/index1234.html.
26 Sous protectorat français et espagnol, le Maroc devient indépendant le 3 mars 1956 à
l’égard de la France et le 7 avril 1956 au regard de l’Espagne.
27 J. Chabih, Les finances des collectivités locales du Maroc. Essai d’une approche
globale des finances locales, l’Harmattan, Paris, 2005, p. 81.
28 Tel a été le cas avec le dahir du 23 juin 1960 relatif à l’organisation communale.
L’année 1962 sera marquée par la consécration constitutionnelle du principe de la
décentralisation territoriale, repris par des dispositions constitutionnelles ultérieures, à
l’instar des articles 86 à 88 du titre 8 de la constitution de 1970 et, plus récemment, par les
articles 100 à 102 de la constitution de 1996.
29 Ce sont la TVA en 1986, l’impôt sur les sociétés en 1987, l’impôt sur le revenu en 1990
et les droits d’enregistrement auxquels s’est greffé un dispositif relatif à la fiscalité locale.
Cette loi-cadre faisait suite à des recommandations découlant du rapport de mission du
FMI de septembre 1978.

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