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48 | Les réformes fiscales locales (France, Maroc, Cameroun)

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importante loi fiscale locale qui pourrait générer des ressources fiscales
substantielles pour les collectivités territoriales de ce pays ; mais il faudrait,
pour ce faire, que les autorités en place revoient préalablement leur copie.
L’actuel système fiscal local du Cameroun ne peut prospérer du fait de
notables imperfections et dysfonctionnements. Le processus de
décentralisation est boiteux, entraînant que la loi susvisée semble avoir été
tuée dans l’œuf. Outre l’omniprésence de l’État central et de ses services
déconcentrés, « le cadre juridique qui régit actuellement la décentralisation
des finances publiques doit être clarifié, les responsabilités se chevauchent,
et, à plusieurs égards, sujettes à diverses interprétations. Il n’y aura pas de
véritable transfert de compétences et de recettes propres : un élément crucial
pour l’instauration d’une contrainte budgétaire rigoureuse. Le dispositif de
transfert gagnerait à viser une plus grande péréquation et la procédure
budgétaire actuelle ne reflète pas pleinement les priorités locales et ne
favorise pas la discipline budgétaire au niveau des collectivités
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décentralisées » .
La loi de 2009 portant fiscalité locale ci-dessus mentionnée révèle un régime
diffus, constitué de sept impôts communaux, vingt taxes communales
diverses et quatorze impôts et taxes affectés à la région, collectivité
territoriale constitutionnellement reconnue, mais non encore installée. Il faut
souligner que le Cameroun vient de reconduire la patente au titre d’impôt
communal, ainsi que le très vieux système français des centimes additionnels
communaux, ce qui conduit à s’interroger sur la pertinence de tels choix, eu
égard aux revirements opérés entre-temps par la France, pays dont le
Cameroun s’inspire largement, souvent au mépris de son contexte.

C. Le Maroc, des dysfonctionnements institutionnels
S’agissant du Maroc, ce pays connaît, dès sa libération, une centralisation du
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pouvoir dont il faut rechercher les origines à la fois dans le Makhzen et

o
23 Il s’agit de la loi n 2009/019 dont les modalités d’application ont été fixées par la
o
circulaire conjointe n 0002335/MINATD/MINFI du 20 octobre 2010.
24 Cahiers économiques du Cameroun : « Vers de meilleures prestations de services –
o
Point sur la situation économique du Cameroun. Spécial décentralisation », n 2, juillet
2011, pp. 9-10.
25 « Le terme Makhzen est un terme politique et géographique à la fois : il désigne une
forme de pouvoir. Le Makhzen est une puissance centralisatrice qui se fonde sur un réseau
complexe d’administration indirecte. Cette forme réticulaire permet d’assurer le contrôle
d’un espace le plus vaste possible aux moyens de ramifications sociales d’allégeances et
d’alliances diverses. Historiquement c’est par ce biais que le Maroc contemporain s’est
construit. Aujourd’hui, ce mode de gouvernement anime encore certains organes du
pouvoir marocain. La relation entre État et Makhzen demeure complexe ». Cf. S. Planiel,
Transformations de l’État et politiques territoriales dans le Maroc contemporain,
L’espace politique, 7/2009-1. Consultable sur :

RIMD – n o 3 – 2012
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