Page 45 - RIMD_2012_3
P. 45
Revue de l’Institut du Monde et du Développement | 45

souvent rendues nécessaires dans l’ensemble des pays susvisés, l’approche
de la bonne gouvernance n’y est forcément pas la même.
Dans la mesure où « le respect des principes de gouvernance et de bonne
11
gouvernance conditionne l’aide au développement » , on est logiquement
amené à penser que la France – un des pays les plus riches de la planète et un
des acteurs principaux de la coopération internationale – n’est pas concernée
par des « prescriptions » visant à la développer. Si au Maroc et au Cameroun
« la gouvernance apparaît […] tantôt comme un concept à la mode, tantôt
12
comme un modèle de développement » , en France, la notion de « bonne
13
gouvernance » relèverait d’une discipline budgétaire (auto-imposée ou
14
15
imposée ) à dessein d’accélérer la croissance du pays. À preuve, la France
fait partie des bailleurs de fonds du Maroc et du Cameroun soit à titre per-
sonnel, soit via les Fonds européens de développement ou autres. Et il y a
lieu de souligner qu’en tant que modèle d’inspiration juridique et institution-
nel des pays susmentionnés, la France semble avoir pris acte du caractère
inopérant de son – système d’antan et s’être définitivement tournée vers des
solutions nouvelles de bonne gouvernance : c’est une autre gouvernance qui
s’appuie (entre autres) sur des règles budgétaires de plus en plus contrai-
gnantes.
Les cas du Maroc et du Cameroun, deux pays africains, nous intéressent à
16
plus d’un titre : l’un et l’autre sont des pays endettés et à revenus intermé-
diaires qui doivent relever leur économie ; l’un et l’autre ont été culturelle-

la bonne gouvernance selon la Commission européenne » in M. Bouvier (dir.), La bonne
gouvernance des finances publiques dans le monde », LGDJ, p. 55.
11 V. Angeon, Th. Houedete, Gouvernance locale et développement territorial. Le cas des
pays du Sud, Améziane Ferguene (Éd.), l’Harmattan, 2004, p. 112.
12 Ibid.
13 À l’instar de la règle d’or constitutionnelle dont la procédure d’adoption définitive est
actuellement en cours.
14 Nous pensons ici au pacte de stabilité et de croissance dont les règles imposent aux
États membres de l’Union européenne une position budgétaire proche de l’équilibre, à
défaut d’être excédentaire.
15 La Banque mondiale à l’origine du principe indiquait déjà en 1992 que la bonne
gouvernance est « la manière par laquelle le pouvoir est exercé dans la gestion des
ressources économiques et sociales d’un pays au service du développement ». Cf. B.
Dioubaté, La Banque mondiale et les pays en développement. De l’ajustement structurel à
la bonne gouvernance, op.cit. Il nous semble donc clair que la France ne peut
manifestement pas rentrer dans la catégorie des pays visés.
16 Nous pensons que le Cameroun et le Maroc n’échappent pas au sort des pays en voie de
développement dont « le montant total de la dette […] est passé de 70 milliards de dollars
en 1970 à 3545 milliards en 2009. Entre-temps, les PED avaient pourtant remboursé
l’équivalent de cent dix fois ce qu’ils devaient initialement ». Voir D. Millet et É.
Toussaint (dir.), « La dette ou la vie », Comité pour l’annulation de la dette du tiers-
monde, éditions Aden, Bruxelles, 2011 ; M. Lazzarato, « La dette ou le vol du temps », Le
monde diplomatique, février 2012, p.28.

RIMD – n o 3 – 2012
   40   41   42   43   44   45   46   47   48   49   50