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Revue de l’Institut du Monde et du Développement | 51
vue statistique). La précision des données est souvent surestimée, et le coût de la
production de l’information sous-estimé (inversement, la fiabilité des informa-
tions fournies par les systèmes statistiques de routine du ministère semble sou-
vent surévaluée, et la possibilité de manipulation sous-estimée).
Par ailleurs, un suivi annuel n’est pas toujours pertinent dans des pays où la va-
riabilité est très forte, et où les enquêtes sérieuses ne sont pas annuelles. D’une
manière générale, il est souvent difficile pour des économistes ou des administra-
tifs d’apprécier les performances sur la base d’indicateurs, sans explications de la
part de techniciens pour juger s’il y a progression ou non en terme d’impact à
long terme (par exemple, un indicateur comme le nombre de césariennes est
intéressant, mais ne renseigne pas sur les indications qui ont conduit à proposer
ce type d’intervention). De même, le nombre d’accouchements assistés ne ren-
seigne pas sur la qualité de la prise en charge.
De plus, le lien entre les objectifs et les indicateurs est parfois discutable. Par
exemple, une partie d’une des tranches variables de la commission européenne
n’a pas été décaissée en 2000 au Burkina Faso, parce que l’indicateur « taux de
e
réussite au CEP et en 6 » n’avait pas atteint l’objectif. Il s’agissait probablement
de favoriser la poursuite des études, mais un taux élevé peut être atteint en rédui-
sant la difficulté des épreuves ou en donnant des instructions aux correcteurs
pour évaluer les épreuves avec mansuétude. La volonté de décaisser aurait donc
pu pousser à détériorer la qualité de l’enseignement, ce qui n’est certainement
pas le but poursuivi.
Autre exemple, les taux de vaccination qui sont utilisés comme indicateurs ou
déclencheurs visent souvent des objectifs très ambitieux, proches de 100 %. Les
épidémiologistes ne considèrent pourtant pas qu’un taux de vaccination aussi
élevé soit nécessaire. Un taux de 80 % est considéré comme suffisant pour garan-
tir que les épidémies restent sous contrôle. Vouloir dépasser ce taux implique
une perte d’efficience importante, car les coûts marginaux augmentent fortement.
Pour vacciner tout le monde, il faut utiliser des stratégies dites avancées, qui
consistent à déplacer les vaccinateurs dans les villages éloignés, ce qui multiplie
les coûts. De plus, le problème n’est pas le taux moyen, qui est généralement
satisfaisant, mais plutôt le fait que certains districts soient défavorisés, ce qui
représente un risque en termes de santé publique. Il est donc préférable de cibler,
par exemple, le taux moyen dans les districts où les taux sont les plus faibles.
Le lien entre les indicateurs et les politiques mises en œuvre n’est pas non plus
toujours facile à établir. Par exemple, l’amélioration des indicateurs de santé
dépend largement de la présence d’infrastructures. En saison des pluies, beau-
coup de villages sont enclavés. La construction de pistes ouvertes en toutes pé-
riodes permettrait d’évacuer les cas les plus graves. De même, les progrès dans le
domaine de l’eau et l’assainissement sont souvent importants pour améliorer ces
mêmes indicateurs.
D’une manière plus générale, il est évidemment difficile de fixer des objectifs
qui soient à la fois ambitieux tout en restant réalistes pour ne pas décourager les
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vue statistique). La précision des données est souvent surestimée, et le coût de la
production de l’information sous-estimé (inversement, la fiabilité des informa-
tions fournies par les systèmes statistiques de routine du ministère semble sou-
vent surévaluée, et la possibilité de manipulation sous-estimée).
Par ailleurs, un suivi annuel n’est pas toujours pertinent dans des pays où la va-
riabilité est très forte, et où les enquêtes sérieuses ne sont pas annuelles. D’une
manière générale, il est souvent difficile pour des économistes ou des administra-
tifs d’apprécier les performances sur la base d’indicateurs, sans explications de la
part de techniciens pour juger s’il y a progression ou non en terme d’impact à
long terme (par exemple, un indicateur comme le nombre de césariennes est
intéressant, mais ne renseigne pas sur les indications qui ont conduit à proposer
ce type d’intervention). De même, le nombre d’accouchements assistés ne ren-
seigne pas sur la qualité de la prise en charge.
De plus, le lien entre les objectifs et les indicateurs est parfois discutable. Par
exemple, une partie d’une des tranches variables de la commission européenne
n’a pas été décaissée en 2000 au Burkina Faso, parce que l’indicateur « taux de
e
réussite au CEP et en 6 » n’avait pas atteint l’objectif. Il s’agissait probablement
de favoriser la poursuite des études, mais un taux élevé peut être atteint en rédui-
sant la difficulté des épreuves ou en donnant des instructions aux correcteurs
pour évaluer les épreuves avec mansuétude. La volonté de décaisser aurait donc
pu pousser à détériorer la qualité de l’enseignement, ce qui n’est certainement
pas le but poursuivi.
Autre exemple, les taux de vaccination qui sont utilisés comme indicateurs ou
déclencheurs visent souvent des objectifs très ambitieux, proches de 100 %. Les
épidémiologistes ne considèrent pourtant pas qu’un taux de vaccination aussi
élevé soit nécessaire. Un taux de 80 % est considéré comme suffisant pour garan-
tir que les épidémies restent sous contrôle. Vouloir dépasser ce taux implique
une perte d’efficience importante, car les coûts marginaux augmentent fortement.
Pour vacciner tout le monde, il faut utiliser des stratégies dites avancées, qui
consistent à déplacer les vaccinateurs dans les villages éloignés, ce qui multiplie
les coûts. De plus, le problème n’est pas le taux moyen, qui est généralement
satisfaisant, mais plutôt le fait que certains districts soient défavorisés, ce qui
représente un risque en termes de santé publique. Il est donc préférable de cibler,
par exemple, le taux moyen dans les districts où les taux sont les plus faibles.
Le lien entre les indicateurs et les politiques mises en œuvre n’est pas non plus
toujours facile à établir. Par exemple, l’amélioration des indicateurs de santé
dépend largement de la présence d’infrastructures. En saison des pluies, beau-
coup de villages sont enclavés. La construction de pistes ouvertes en toutes pé-
riodes permettrait d’évacuer les cas les plus graves. De même, les progrès dans le
domaine de l’eau et l’assainissement sont souvent importants pour améliorer ces
mêmes indicateurs.
D’une manière plus générale, il est évidemment difficile de fixer des objectifs
qui soient à la fois ambitieux tout en restant réalistes pour ne pas décourager les
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