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106 | Le système local tchèque : un modèle ?

II. L’état de la décentralisation : réalités et limites

Le critère majeur pour repartir les pays postcommunistes se trouve sans doute
dans l’appréciation de l’avancée du processus de décentralisation. On peut asso-
cier au groupe de l’Europe centrale et orientale défini par Heinelt et Hlepas,
enrichi par d’autres pays de cet espace européen, les pays caractérisés par une
décentralisation fonctionnelle effective ou une autonomie communale en cours
de création ou de reconstruction [Jüptner 2009 : 395]. Dans ce groupe, on peut
inclure la République tchèque, la Pologne, la Hongrie, la Slovénie et même la
Lettonie et l’Estonie. Pour ces deux derniers pays le rétablissement de
l’autonomie locale était aussi un symbole de la rupture vis-à-vis du régime sovié-
tique et, ce alors même qu’ils ont conservé quelques institutions locales héritées
de l’ère « soviétique ».
La classification dans ce groupe ne signifie pas automatiquement que les limites
de l’autonomie locale sont stables comme le montre la Pologne, qui a mis en
œuvre plusieurs reformes de décentralisation dans les années 1980. Ce mouve-
ment dynamique sur un niveau horizontal se manifeste, par exemple, par
l’adoption du vote au suffrage direct des chefs de comités exécutifs en 2002. La
réduction progressive du nombre des communes et leur part grandissante dans le
PIB est pourtant un indicateur explicite de l’inclinaison vers le groupe de
l’Europe de Nord.
Les reformes hongroises, quant à elles, sont considérées par les professionnels
comme étant méticuleuses et par certains égards, on peut constater qu’elles se
sont inspirées des systèmes communaux développés en Allemagne. Pourtant, en
Hongrie, on peut trouver une certaine dynamique de niveau vertical, reflétée par
le renforcement des comitats (joupanies) qui représentent le niveau régional du
système politique hongrois, et une autre dynamique de niveau horizontal caracté-
risée par l’extension de l’élection directe des maires. Même si on peut
s’interroger sur la dépendance des finances des communes aux subventions du
budget de l’État, Heinelt et Hlepas ont considéré que le système communal de la
Hongrie répond encore davantage aux caractéristiques de ce groupe que celui de
la Pologne [Heinelt, Hlepas 2006: 28].
Le deuxième groupe de pays est aussi sur le chemin du rétablissement ou bien de
la création de l’autonomie locale fonctionnelle. La différence avec le premier
groupe repose sur un retard et sur une mise en œuvre difficile et problématique
de cette tendance [Jüptner 2009 : 396]. La Slovaquie et la Croatie sont les repré-
sentants typiques de ce groupe. Leurs systèmes, dans les années 1980, avaient
satisfait plusieurs indicateurs de soi-disant démocratie non libérale. Le gouver-
nement de Meciar en Slovaquie et le président Tudjman en Croatie ont préféré
l’État centralisé à la décentralisation du pouvoir. Cependant, la tendance à la
décentralisation s’est tout de même manifestée dans ces deux pays. En Slova-
quie, il s’agissait du renforcement des communes par la décentralisation fiscale
et la création de l’autonomie au niveau régional. En 2001, la Croatie a élargi les


RIMD – n o 2 – 2011
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