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Revue de l’Institut du Monde et du Développement | 125
de première puissance de la planète. Auparavant, dans les années 1980,
c’était le pays du Soleil Levant que les Américains accusaient de s’emparer
des intérêts technologiques et stratégiques des États-Unis. En France, Édith
Cresson affirmait que le Japon ambitionnait de conquérir le monde, et que
ses investissements dans le pays se révélaient destructeurs. Mais dans la
décennie suivante, la miraculeuse croissance du Japon s’effondrait, as-
phyxiée par des années de surinvestissements et de crédits démesurés. On se
demande maintenant si l’Empire du Milieu s’écroulera comme l’a fait le pays
du Soleil Levant, ou s’il avalera l’Occident. En attendant, les Chinois ayant
mis sur pied une formidable machine de guerre commerciale, sont accusés de
pratiquer une stratégie de conquête débouchant sur une politique de préda-
tion. Mais la menace n’est pas qu’économique, elle est aussi militaire :
« Chasseurs, porte-avions, missiles… En s’inspirant des technologies de son
fournisseur russe, Pékin a bâti une armée moderne, et une industrie ambi-
5
tieuse qui commencent à inquiéter Américains et Européens ». Aujourd’hui,
c’est bien la Chine qui ayant éclipsé le Japon, incarne à elle seule le péril
6
jaune . Vue de Chine, l’Europe est aujourd’hui perçue comme un beau et
vieux musée figé dans son passé où l’État providence serait responsable de la
crise de la dette par des lois sociales obsolètes donnant l’image d’une société
vermoulue, en fin de course, vivant d’acquis sociaux exorbitants. Aussi, le
système d’incitation au travail serait-il complètement faussé, conduisant à la
paresse et à l’indolence, plutôt qu’au labeur énergique et enthousiaste. Vision
de masse de travailleurs à bout de souffle sombrant dans la médiocrité, hyp-
notisés par des avantages sociaux auxquels ils s’agrippent désespérément,
réclamant toujours plus de sécurité, synonyme de manque d’initiative et
d’esprit de compétitivité. Rivalités politiques aussi et manque d’unité, cer-
tains prenant leur retraite à 55 ans, et d’autres à plus de 65 ans, complètent ce
tableau peu flatteur. L’image qui s’impose est celle d’une vieille Europe sans
croissance, sans cohésion sociale et politique, criblée de dettes, rongée par la
crise et la flambée du chômage, en plein déclin et figée dans un passé révolu.
Dans de brefs moments de lucidité, le regard que l’Europe porte sur elle-
même n’est guère complaisant. Incapable d’être à la hauteur, en proie à des
dissensions et à des rivalités incessantes, l’Europe démontre une fois de plus
« que la Chine menace moins l’Europe que l’Europe elle-même ». Elle donne
le calamiteux spectacle d’une « Europe en retard sur son retard » face à « la
Chine en avance sur son avance ».
5 L’Expansion n 769, décembre 2011, p. 58.
o
6 Le journal L’Expansion de décembre 2011 titrait « Pourquoi la Chine fait peur : Hier des
ports et des grandes marques ; aujourd’hui, des brevets et des ingénieurs ; demain des
obligations d’État… Pékin fait son marché dans une Europe en déclin (L’Expansion,
no 769, décembre 2011, p. 36).
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de première puissance de la planète. Auparavant, dans les années 1980,
c’était le pays du Soleil Levant que les Américains accusaient de s’emparer
des intérêts technologiques et stratégiques des États-Unis. En France, Édith
Cresson affirmait que le Japon ambitionnait de conquérir le monde, et que
ses investissements dans le pays se révélaient destructeurs. Mais dans la
décennie suivante, la miraculeuse croissance du Japon s’effondrait, as-
phyxiée par des années de surinvestissements et de crédits démesurés. On se
demande maintenant si l’Empire du Milieu s’écroulera comme l’a fait le pays
du Soleil Levant, ou s’il avalera l’Occident. En attendant, les Chinois ayant
mis sur pied une formidable machine de guerre commerciale, sont accusés de
pratiquer une stratégie de conquête débouchant sur une politique de préda-
tion. Mais la menace n’est pas qu’économique, elle est aussi militaire :
« Chasseurs, porte-avions, missiles… En s’inspirant des technologies de son
fournisseur russe, Pékin a bâti une armée moderne, et une industrie ambi-
5
tieuse qui commencent à inquiéter Américains et Européens ». Aujourd’hui,
c’est bien la Chine qui ayant éclipsé le Japon, incarne à elle seule le péril
6
jaune . Vue de Chine, l’Europe est aujourd’hui perçue comme un beau et
vieux musée figé dans son passé où l’État providence serait responsable de la
crise de la dette par des lois sociales obsolètes donnant l’image d’une société
vermoulue, en fin de course, vivant d’acquis sociaux exorbitants. Aussi, le
système d’incitation au travail serait-il complètement faussé, conduisant à la
paresse et à l’indolence, plutôt qu’au labeur énergique et enthousiaste. Vision
de masse de travailleurs à bout de souffle sombrant dans la médiocrité, hyp-
notisés par des avantages sociaux auxquels ils s’agrippent désespérément,
réclamant toujours plus de sécurité, synonyme de manque d’initiative et
d’esprit de compétitivité. Rivalités politiques aussi et manque d’unité, cer-
tains prenant leur retraite à 55 ans, et d’autres à plus de 65 ans, complètent ce
tableau peu flatteur. L’image qui s’impose est celle d’une vieille Europe sans
croissance, sans cohésion sociale et politique, criblée de dettes, rongée par la
crise et la flambée du chômage, en plein déclin et figée dans un passé révolu.
Dans de brefs moments de lucidité, le regard que l’Europe porte sur elle-
même n’est guère complaisant. Incapable d’être à la hauteur, en proie à des
dissensions et à des rivalités incessantes, l’Europe démontre une fois de plus
« que la Chine menace moins l’Europe que l’Europe elle-même ». Elle donne
le calamiteux spectacle d’une « Europe en retard sur son retard » face à « la
Chine en avance sur son avance ».
5 L’Expansion n 769, décembre 2011, p. 58.
o
6 Le journal L’Expansion de décembre 2011 titrait « Pourquoi la Chine fait peur : Hier des
ports et des grandes marques ; aujourd’hui, des brevets et des ingénieurs ; demain des
obligations d’État… Pékin fait son marché dans une Europe en déclin (L’Expansion,
no 769, décembre 2011, p. 36).
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