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94 R e v u ed el ’ I n s t i t u td uM o n d ee td udéveloppement
L e 30 juin 2012, Orange a arrêté le service télétel, rendant ainsi inopé-
rants les derniers Minitels qui continuaient à être utilisés en Bretagne
par certains éleveurs pour la traçabilité du cheptel. Ce sont plus de 500 000
terminaux qui vont devenir inutilisables. L’expérience du Minitel a com-
mencé dans les années 1980, en Ille-et-Vilaine dans la ville de Saint-Malo.
1
Le Minitel, cette boîte cubique, premier Network Computer , surprend par
son dépouillement lors de sa diffusion. Il trône près du téléphone, avant de
pouvoir s’émanciper et composer lui-même les numéros d’appel du kiosque
télétel. Ce sont donc après 30 ans de bons et loyaux services, les adieux
d’une technologie déclarée obsolète depuis la fin du vingtième siècle et dont
l’arrêt a été plusieurs fois annoncé puis repoussé.
Le Minitel fait maintenant partie de la légende qui a vu la France partici-
per, en tant qu’acteur, au développement de l’informatique avant de se voir
reléguée à un rôle secondaire, devant la prédominance de la technologie
des grandes firmes nord-américaines puis asiatiques. Le Minitel a permis
aux Français et aux entreprises françaises de découvrir et de se familiariser
avec les téléservices, que ce soit la banque à domicile, le commerce électro-
nique ou l’administration électronique. Mais, le Minitel a-t-il été un leurre
masquant le déclin technique de la technologie numérique française, où
faut-il n’y voir qu’un alibi pour masquer les tergiversations politiques ayant
entraîné ce déclin ?
§ 1 – Minitel, Télétel, une expérimentation française réussie
Le téléphone n’a pas toujours été une technique banalisée en France. Au-
jourd’hui, chaque Français possède, ou peut posséder, son téléphone per-
sonnel, téléphone mobile, qui le suit partout dans ses déplacements. Après
la Seconde Guerre mondiale, le téléphone était rare, et les lignes télépho-
niques de piètre qualité. Fernand Raynaud, avec son sketch « le 22 à As-
nières », a, en son temps, ironisé sur les difficultés rencontrées pour joindre
un correspondant français au téléphone.
Jusque dans les années 1970, le téléphone restait en France un objet convoi-
té et difficile à obtenir. Le délai d’attente, pour avoir accès à une ligne té-
léphonique personnelle, était de plusieurs mois. J’ai connu un comptable
agréé qui devait aller au bureau de poste près de chez lui pour appeler ses
clients, et ce, pendant plusieurs mois. Il existait des professions prioritaires
pour l’accès à ce téléphone, par exemple les médecins. Des dérogations à
1 Le Minitel ne comporte aucun composant intelligent ni de stockage, l’information affi-
chée est transmise par un serveur qui dispose des bases de données et de l’intelligence des
applications. Télétel amorce les prémices de l’informatique en nuage, cloud computing, en
hébergeant les applications et les données dans un réseau de serveurs accessibles via Trans-
pac, réseau de transmission de données.
o
RIMD–n 4–2013
L e 30 juin 2012, Orange a arrêté le service télétel, rendant ainsi inopé-
rants les derniers Minitels qui continuaient à être utilisés en Bretagne
par certains éleveurs pour la traçabilité du cheptel. Ce sont plus de 500 000
terminaux qui vont devenir inutilisables. L’expérience du Minitel a com-
mencé dans les années 1980, en Ille-et-Vilaine dans la ville de Saint-Malo.
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Le Minitel, cette boîte cubique, premier Network Computer , surprend par
son dépouillement lors de sa diffusion. Il trône près du téléphone, avant de
pouvoir s’émanciper et composer lui-même les numéros d’appel du kiosque
télétel. Ce sont donc après 30 ans de bons et loyaux services, les adieux
d’une technologie déclarée obsolète depuis la fin du vingtième siècle et dont
l’arrêt a été plusieurs fois annoncé puis repoussé.
Le Minitel fait maintenant partie de la légende qui a vu la France partici-
per, en tant qu’acteur, au développement de l’informatique avant de se voir
reléguée à un rôle secondaire, devant la prédominance de la technologie
des grandes firmes nord-américaines puis asiatiques. Le Minitel a permis
aux Français et aux entreprises françaises de découvrir et de se familiariser
avec les téléservices, que ce soit la banque à domicile, le commerce électro-
nique ou l’administration électronique. Mais, le Minitel a-t-il été un leurre
masquant le déclin technique de la technologie numérique française, où
faut-il n’y voir qu’un alibi pour masquer les tergiversations politiques ayant
entraîné ce déclin ?
§ 1 – Minitel, Télétel, une expérimentation française réussie
Le téléphone n’a pas toujours été une technique banalisée en France. Au-
jourd’hui, chaque Français possède, ou peut posséder, son téléphone per-
sonnel, téléphone mobile, qui le suit partout dans ses déplacements. Après
la Seconde Guerre mondiale, le téléphone était rare, et les lignes télépho-
niques de piètre qualité. Fernand Raynaud, avec son sketch « le 22 à As-
nières », a, en son temps, ironisé sur les difficultés rencontrées pour joindre
un correspondant français au téléphone.
Jusque dans les années 1970, le téléphone restait en France un objet convoi-
té et difficile à obtenir. Le délai d’attente, pour avoir accès à une ligne té-
léphonique personnelle, était de plusieurs mois. J’ai connu un comptable
agréé qui devait aller au bureau de poste près de chez lui pour appeler ses
clients, et ce, pendant plusieurs mois. Il existait des professions prioritaires
pour l’accès à ce téléphone, par exemple les médecins. Des dérogations à
1 Le Minitel ne comporte aucun composant intelligent ni de stockage, l’information affi-
chée est transmise par un serveur qui dispose des bases de données et de l’intelligence des
applications. Télétel amorce les prémices de l’informatique en nuage, cloud computing, en
hébergeant les applications et les données dans un réseau de serveurs accessibles via Trans-
pac, réseau de transmission de données.
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